Pays du désert absolu, d’une beauté presque irréelle, la Mauritanie offre un paysage varié, particulièrement dans l’Adrar mauritanien. Oueds ensablés, plateaux rocheux, dunes sensuelles et oasis inattendues donnent à la région une sensation de bout du monde.

En arabe, le terme Adrar signifie « montagne ». Mais une fois sorti de l’aéroport international d’Atar, la capitale de la région, on se demande où elle peut bien se cacher. Au loin, des reliefs géométriques de falaises rocheuses de grès couleur ocre dessinent l’horizon – style Colorado – mais point de montagne. Surprise donc : le toponyme ne reflète pas la nature du paysage – du moins dans l’acception française. L’Adrar est en réalité un gigantesque plateau, l’horizon semble lointain, quasiment inaccessible. À chaque regard lancé en quête d’une improbable image familière, il paraît s’éloigner…

Aux portes du désert

Si l’on en croit les amoureux de la région (et ils sont nombreux), les Hautes- Alpes sont un département aux multiples attraits. Et les passionnés d’égrener, tel un inventaire à la Prévert, les raisons pour lesquelles, quand vous passez l’une des multiples portes de ce territoire. Mais pour le randonneur, elle ne possède pas une grande force d’attraction, juste un lieu de passage. Pour véritablement entamer le périple, il faut mettre le cap vers Chinguetti, la ville des sables, à 85 km de là. Ou plutôt, à 1h20 car ici, les distances sont calculées en temps de voyage, résurgence du passé nomade de la population. Si la route goudronnée est confortable au départ, elle se mue vite en chemin de terre aride de rocailles poussiéreuses et bosselées. Première escale : un champ de stromatolites. Sous ce terme très scientifique se dissimule une réalité géologique ; celle de la formation rocheuse calcaire amorcée il y a 3,5 milliards d’années. Il s’agit de la première manifestation de vie dont la trace nous soit parvenue. Ce champ de roches bleues contraste avec le jaune du sable et donne l’impression, vu de loin, d’un océan ondulé – un mirage dans un mirage. Plus loin : la passe Nouatil, plus connue sous le nom de passe de Ould Ebnou. Creusée au flanc de la falaise et aménagée d’une route en 1987 afin de désenclaver la ville de Chinguetti, elle possède un dénivelé de plus de 250 m et permet de s’élever au-dessus de la plaine d’Atar. Panorama immanquable. Une fois le sommet atteint, la piste devient sable, tantôt jaune, tantôt orange, qui s’amuse à recouvrir la piste dans un gracieux ballet porté par les caresses du vent.

Savoirs ensablés

Un panneau sur le bas-côté de la piste indique que nous entrons dans Chinguetti, 7e ville sainte de l’Islam. Autrefois importante cité caravanière, en plein cœur du désert, la ville a su conserver la mémoire de ce passé glorieux. « Au début du 20e siècle, c’était près de 32000 pèlerins par semaine qui y passait, » raconte Saïf, le sage du coin. « Maintenant, le désert est déserté ! » Saïf, le jeune vieillard de Chinguetti – comme il aime se présenter – a hérité de la bibliothèque familiale : un patrimoine important de livres anciens et de manuscrits arabes qui témoignent d’un mode de vie traditionnel, centré sur la culture nomade de la population du Sahara occidental. Certains dateraient du 10e siècle. Désormais, il expose fièrement ses trésors via la fondation Al Ahmed Mahmoud qu’il a créée. Au sein de la cour intérieure, une affiche griffée d’une citation donne le ton : « Le savoir est la seule richesse que l’on peut distribuer sans risquer de se ruiner ». Côté architectural, la ville a gardé son tissu urbain, avec ses maisons de pierre et de banco (mélange de terre crue et de paille), se serrant en ruelles étroites autour d’une mosquée à minaret carré. Les marches des maisons sont hautes, très hautes, afin d’empêcher le sable de se faufiler. Insaisissable et gourmand, ce sable a déjà englouti l’ancienne ville.

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Car oui, le désert gagne du terrain. L’ensablement est un fléau intemporel que les Mauritaniens combattent ensemble avec des murs et des plantations, en essayant vainement de le ralentir. Pour s’en rendre compte, rien de tel qu’une petite randonnée dans le paysage dunaire avoisinant la ville : le cordon de Ouaranne. Un véritable océan ondulé de dunes sablées, de couleur jaune, blanc, blond, ocre – flamboyant. La pureté des formes et des tracés relaxe le regard et le son du sable qui se promène au gré du vent engourdit l’esprit. Certaines sont crêtées, d’autres moins. En quelques endroits épars, des pousses d’herbes rebelles surgissent du sable, mais elles sont rares. La surface des dunes est striée par le vent, formant des petites vagues parallèles dans un océan plus large. Parfois, au détour d’une dune, on croise quelques minuscules empreintes. Elles ressemblent à celles d’un oiseau sautillant, mais ce sont celles d’un scarabée du désert. Au coucher du soleil, le paysage prend une nouvelle dimension : les ombres s’allongent et la couleur du sable semble en perpétuel changement.

Par la voie des oasis

Au départ de Chinguetti, le mieux est d’opter pour la randonnée – le trekking, le vrai.
Direction Ouadane, autre ancienne ville caravanière. À pied, le circuit est planifié sur six jours à travers le grand erg, même s’il est dit que les nomades le font en trois. La randonnée n’est pas d’une grande difficulté ; elle est ouverte aux « bleus du désert » – au sens littéral. Le Sahara est ici assez généreux : les différents oueds abritent de nombreuses palmeraies et des villages s’y sont progressivement fixés, où la population pratique le maraîchage et la phéniciculture (culture du palmier). Arrêt intéressant (et reposant) : l’oasis de Tenaouchert. La palmeraie au milieu du désert accueille quelques familles, mais depuis la vertigineuse chute de la fréquentation touristique en Mauritanie (de près de 90%) due aux attentats d’Alleg de décembre 2007, elles sont de moins en moins nombreuses. A peine 40 personnes y résident toute l’année, un chiffre qui augmente considérablement lors de la très attendue Guetna, période de récolte de dattes. Lors de l’apogée du tourisme mauritanien en 2007 (15000 touristes sur l’année, la plupart français), l’oasis comptait 21 familles. Le tourisme peut jouer ici un facteur de fixation des populations. Les nomades se sédentarisent pour accueillir et profiter des retombées économiques des visiteurs ce qui, au final, permet de créer des petits villages qui peuvent se développer. L’accueil est ici le maître mot. Sous l’ombre douce d’une Khaïma (tente), on se plaît à discuter avec les Mauritaniens, autour du traditionnel thé noir à la menthe qui facilite l’échange. Et souvent, un thé en amène un autre. Autre breuvage qui vaut le coup de papille : le zrig. Il se compose de lait de chamelle, d’eau et de sucre. Vanté pour ses qualités gustatives et pour ses vertus sur la santé, les Mauritaniens en raffolent.

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Conseils de trek
Rando 

  • pas de difficulté technique et physique majeure. La difficulté principale est la fatigue du voyage itinérant conjuguée avec l’inconfort des bivouacs, la chaleur ou les variations de température et le changement de rythme.
  • Météo : de décembre à février : 20 à 30 ° dans la journée et 5 à 15 ° la nuit. Octobre, novembre, mars et avril : de 25 ° à 35 ° (parfois plus) dans la journée et 15 à 25 °la nuit.
  • La nourriture : compte tenu du climat et de la localisation, il est rarement possible de se procurer des légumes et des fruits en quantité. Les menus sont donc évidemment simples, très proches de ceux consommés par les sahariens, car c’est le type de nourriture qui s’adapte le mieux au climat et à la vie itinérante. Vous pourrez, si vous le souhaitez compléter par quelques aliments énergétiques apportés de France dans vos bagages.
  • L’eau : elle n’est pas absente, mais demande parfois quelques efforts pour la puiser. Il convient donc de l’économiser par sagesse et responsabilité (surtout pour la toilette). Cette eau n’a pas toujours un bel aspect et a quelquefois un goût particulier propre à chaque point d’eau.
  • La marche reprend et enfin, on aperçoit Oudane, en contrebas d’une falaise. Perchée sur son rocher noir, dominant un fleuve de palmiers dattiers, elle montre fièrement son attrait principal : les ruines de l’ancienne ville. Érigée en 1140 par des savants musulmans hadjis (titre que prennent tous les musulmans qui ont accompli les pèlerinages de la Mecque, de Médine ou de Jérusalem.), propagateurs de l’Islam, la ville était connue pour son intense activité culturelle et scientifique. Il est dit qu’on pouvait compter jusqu’à quarante savants dans une même ruelle. Les restes de la cité sont aujourd’hui en danger d’ensevelissement, fragilisés par l’avancée du désert. À l’intérieur, c’est un vrai labyrinthe. Sans un guide, il serait difficile de retrouver son chemin !

    Bivouac dans la vallée blanche

    Sur les longues pistes presque oubliées de l’Adrar, l’aventure prend toujours le dessus. Par delà les dunes, on se sent léger. Par delà les oueds ensablés, on se sent charmé. Le plus connu d’entre eux : l’oued El Abiod – ou la Vallée Blanche. Voilà un trek original, qui saura satisfaire les plus exigeants : de dunes en canyons, de plateaux en oasis, les paysages sont extrêmement variés. En arrivant à l’oued, le terrain est rocailleux. Ensuite, on rencontre des barkhanes, ces dunes esseulées en forme de croissant, qui se déplacent à raison de six mètres par an. Et puis d’un coup, de nouveau du sable. Il est partout, partant même à l’assaut des montagnes. C’est d’ailleurs cela qui fait la renommée de l’endroit ; une passe entre deux falaises, recouverte de dunes multicolores : la passe de Tifoujar. Avant de s’y lancer à corps perdu, il est bon de poser le bivouac. Un très bel endroit pour s’installer. L’oued est parsemé de petits acacias, utiles pour se couper du vent la nuit venue. S’endormir à la belle étoile dans pareil endroit est simplement magique, surtout si c’est une nuit de pleine lune. Après une bonne nuit de sommeil dans le sac de couchage, place à l’étape finale, Tergit, l’oasis du bonheur. Elle possède une source d’eau tiède naturelle, qui ruissèle le long des palmiers ombragés. En fin d’itinéraire, après de longues marches sous le soleil saharien, elle peut prendre des allures d’Éden. On a vite fait de sortir son maillot pour se baigner, histoire de balayer l’épaisse couche de sable qui recouvre l’épiderme.

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    Tea for two, three, four…En Mauritanie, le thé, importé de Chine, est la boisson nationale. Il est surnommé «whisky du désert». Il se déguste avec de la mousse et en trois fois, comme le veut la tradition : le premier amer, comme la vie ; le second doux, comme l’amour ; et le troisième, suave comme la mort. La cérémonie du thé est un élément important dans la vie des mauritaniens : c’est un signe de bienvenue. Il est impoli de le refuser et de partir avant la troisième tasse. Comme dans bien d’autres cultures, des coutumes et rites sociaux se sont développés autour du thé.

    Théodore Monod l’avait compris : c’est dans le désert que l’on découvre les plus grandes richesses. Les raisons de s’y aventurer sont multiples : les uns ressentiront son appel esthétique, les autres ressentiront son appel intérieur. Peu importe. Comme on le dit si bien ici, le visiteur sera de retour. Car s’il vient la première fois pour la Mauritanie, il reviendra pour les Mauritaniens.

    Y aller

    – Formalités : vous devrez avoir un passeport en cours de validité. Le visa sera établi sur place à l’arrivée à l’aéroport d’Atar par les autorités locales.

    S’informer

    • Ambassade de Mauritanie : 5, rue de Montevideo, 75116 Paris.
    • Consulat de Mauritanie : 89, rue de Cherche-Midi, 75006 Paris. Au 1er étage, côté gauche.
    • Se loger

      • A Chinguetti : – Le Maure Bleu : hébergement, restauration, jardin, espace détente, sanitaires bien équipés (4 douches, 3 wc et lavabos indépendants) E-mail : sylviedesert@maurebleu.com. – L’Eden : Son objectif est de faire découvrir à sa clientèle, composée essentiellement de voyageurs indépendants, sa région, l’Adrar Mauritanien. Il peut bien sûr vous trouver un guide, un ou plusieurs chameliers, des chameaux, vous conseiller des itinéraires … Mais il peut aussi vous faire découvrir la vie d’un nomade, ou la vie des jardins. Il peut même vous aider à organiser une méharée en solo.
      • A Nouakchott : – L’escale des sables : Myriam et son fils
      • Abdoullah vous accueillent avec convivialité dans cette vaste demeure. La décoration est inspirée de l’artisanat ancien ; elle possède un jardin avec piscine et des terrasses ombragées.

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